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jeudi 15 avril 2010

Bïa s'impose comme écrivaine à son premier essai

Bïa s’est imposée comme chanteuse au Québec. Si le prénom est familier, il faudra tenir compte maintenant de Krieger, son nom de famille. «Les Révolutions de Marina» nous plonge dans les pérégrinations qui ont marqué son enfance.
Militants engagés, ses parents devaient changer d’identité et se déplacer constamment pour échapper à la police et à la dictature. 
«Ceux, qui, comme mes parents, ne croyaient pas à la violence comme moyen pouvant servir des fins légitimes, vouaient leur existence à la diffusion d’organes d’information illégaux, à l’organisation de syndicats, à la sensibilisation des masses laborieuses et à la pénétration des idées libertaires tant dans les couches opprimées que chez les intellectuels du pays.» (p.14)
Pendant ces disparitions, la jeune Marina se retrouvait chez ses grands-parents maternels. Un couple conservateur, mais des gens généreux qui n’hésitaient jamais à aider leurs enfants.

Le goût de l’exil

Marina prend goût à ces exils qui la mèneront dans différents pays d’Amérique du Sud. Particulièrement le Chili pendant le court règne de Salvador Allende. Ses parents y trouvent du travail et peuvent enfin vivre au grand jour, n’ayant plus à dissimuler leurs idées et leurs croyances. Tout semble possible pendant cette période d’euphorie.
«J’aimai le Chili. Son air froid et sec qui faisait geler les crottes de nez, provoquant sans cesse des saignements de narines. Son peuple si taciturne, grave, mélancolique et assoiffé de poésie, ces visages homogènes, cette parfaite chiliennitude faite de cheveux noirs de jais, d’yeux légèrement bridés, de pommettes hautes et de peaux mates, de femmes sérieuses et sans fard et d’hommes introspectifs épargnés par la calvitie.» (p.69)
Le rêve ne durera pas. Il faudra s’exiler au Portugal cette fois, composer avec une société sclérosée.

Le Brésil

Et après bien des déplacements, des escales chez les grands-parents, elle retrouve le Brésil à l’âge de l’adolescence.
«Je débarquai au pays du dévergondage, où l’on expose les rondeurs charnues sans y penser, où l’on s’appelle «mon amour» et «chéri» à la caisse du supermarché ou dans l’autobus. «Tu n’as pas l’appoint chérie?» «Ah, désolée, mon cœur ! Je n’ai aucune monnaie !» Le langage corporel, le ton de voix langoureux et les attouchements triviaux du plus banal échange carioca seraient passés à Lisbonne pour une invitation à la débauche; et sous ces gais tropiques les bikinis tenaient moins de place qu’une balle de ping-pong dans une main fermée. J’étais dépaysée dans mon propre pays.» (p.35)
Les migrations peuvent faire en sorte que l’on devient étranger dans son propre pays.

Témoignage

Apprentissage des langues, découverte de la différence, Bïa Krieger témoigne de son vécu simplement. La fillette montre une capacité de résilience et d’adaptation exceptionnelle.
Le récit passe de la vie de l’enfant à celle de l’adolescente qui connaît ses premiers émois avec des garçons pour replonger dans ses premières années. Une fois familiarisé avec ces allers et ces retours, on suit la narratrice avec plaisir.
Bïa Krieger est plus qu’une chanteuse. Elle démontre dans «Les Révolutions de Marina» un talent d’écrivaine.

«Les Révolutions de Marina» de Bïa Krieger est publié aux Éditions du Boréal.

dimanche 10 janvier 2010

Bïa Krieger crée une belle surprise

Bïa est une chanteuse appréciée au Québec. La douceur de ses musiques et la langueur de sa voix savent nous bercer comme un chaud soleil de juillet. Son dernier disque en compagnie d’Yves Desrosiers est un petit bijou.
Si le prénom s’est imposé, il faudra tenir compte maintenant de Krieger, son nom de famille en raison de ce récit. «Les Révolutions de Marina» nous entraîne dans son enfance au Brésil et ses nombreuses pérégrinations.
Militants engagés, ses parents ont vécu dans la clandestinité. Ils devaient multiplier les réseaux pour se protéger, changer d’identité pour échapper à la police et à la dictature, pratiquer l’art du caméléon pour rester en vie.
«Ceux, qui, comme mes parents, ne croyaient pas à la violence comme moyen pouvant servir des fins légitimes, vouaient leur existence à la diffusion d’organes d’information illégaux, à l’organisation de syndicats, à la sensibilisation des masses laborieuses et à la pénétration des idées libertaires tant dans les couches opprimées que chez les intellectuels du pays.» (p.14)
Les parents de la petite Marina disparaissent souvent et elle se retrouve chez ses grands-parents maternels. Des gens qui ont du mal à comprendre pourquoi leur fille conteste le régime et le pouvoir en place. Un couple conservateur, mais de grands cœurs capables de générosité pour leurs enfants. Ils étaient toujours là pour accueillir leur petite-fille et la choyer.

Le goût du voyage

Marina apprend à vivre avec ces départs et ces retours, prend goût à ces exils qui la mèneront dans différents pays d’Amérique du Sud et au Portugal. Et après bien des déplacements, elle retrouve son Brésil à l’âge de l’adolescence.
«Je débarquai au pays du dévergondage, où l’on expose les rondeurs charnues sans y penser, où l’on s’appelle «mon amour» et «chéri» à la caisse du supermarché ou dans l’autobus. «Tu n’as pas l’appoint chérie?» «Ah, désolée, mon cœur! Je n’ai aucune monnaie!» Le langage corporel, le ton de voix langoureux et les attouchements triviaux du plus banal échange carioca seraient passés à Lisbonne pour une invitation à la débauche ; et sous ces gais tropiques les bikinis tenaient moins de place qu’une balle de ping-pong dans une main fermée. J’étais dépaysée dans mon propre pays.» (p.35)
Les migrations constantes peuvent faire en sorte que l’on devient un étranger dans son propre pays.

Le Chili

Les parents de Bïa se retrouvent au Chili pendant le court règne de Salvador Allende. Ils y trouvent du travail et peuvent enfin vivre librement. Ils oeuvrent dans une société qui correspond à leurs idées. Tout semble devenir possible pendant cette période. Le temps des migrations était peut-être chose du passé.
«J’aimai le Chili. Son air froid et sec qui faisait geler les crottes de nez, provoquant sans cesse des saignements de narines. Son peuple si taciturne, grave, mélancolique et assoiffé de poésie, ces visages homogènes, cette parfaite chiliennitude faite de cheveux noirs de jais, d’yeux légèrement bridés, de pommettes hautes et de peaux mates, de femmes sérieuses et sans fard et d’hommes introspectifs épargnés par la calvitie.» (p.69)
Le rêve ne durera pas. Il faudra encore une fois prendre la fuite, s’exiler au Portugal cette fois, dans une société traditionnelle et un peu sclérosée.

Différence

Apprentissage des langues, découverte de la différence, Bïa témoigne de son vécu simplement. Un regard aimant et sans complaisance sur ses parents qui finissent par se séparer pour refaire leur vie. L’enfant n’en souffrira guère, adorant sa seconde mère, son nouveau frère et sa nouvelle sœur. Elle vivra ces bouleversements sans crises existentielles ou grandes révoltes. L’enfant montre une capacité de résilience et d’adaptation exceptionnelle.
Un peu déroutant, le récit épouse le parcours de la vie de Bïa, les départs et les retours en arrière, passe de la vie de l’enfant à celle de l’adolescente qui vit ses premiers émois avec des garçons pour replonger dans ses premières années. Une fois familiarisé avec cette façon de raconter, à ces allers et ces retours, on suit la narratrice avec plaisir.
Touchant, bien écrit, sensible, intelligent, ce récit nous entraîne dans une vie qui sort de l’ordinaire. Un récit autobiographique étonnant. Bïa Krieger est plus qu’une chanteuse. Elle démontre un beau talent d’écrivaine.

«Les Révolutions de Marina» de Bïa Krieger est publié chez Boréal Éditeur.
http://www.editionsboreal.qc.ca/catalogue/auteurs/bia-krieger-1641.html