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dimanche 15 mai 2005

Françoise Tremblay bouscule les tabous


Après ses premiers pas avec «L’Office des Ténèbres» en 1995, un recueil de nouvelles percutantes et dérangeantes, Françoise Tremblay plongeait dans le genre romanesque aux Éditions Trois-Pistoles. «Souvenirs de Carthage», paru en 2003, même s'il n'a pas pris d’assaut les palmarès, a été bien reçu. L'auteure originaire de Saint-Edmond-les-Plaines, au Lac-Saint-Jean, récidive avec «Les Nocturnes», un roman-puzzle qui met en scène deux hommes et deux femmes. Comme si elle avait choisi ce titre pour nous présenter des «musiques de nuit» aux accents douloureux.
Le groupe des «A», Alexis et André, jouent dans un petit «band». André, fils d'émigrants persécutés et pourchassés, est un être discret, peu sûr de lui, solitaire, dominé par une mère qui, même si elle est au Québec, vit comme si elle avait le monde à ses trousses.
Alexis, tout le contraire, est instable et irresponsable. Ce coureur s'est laissé piéger par la vie de famille. Les  «M», Margot et Marie, passent et viennent dans leur vie.
Magot scrute des chiffres à la banque en surveillant André et en rêvant d’amour. Marie devient danseuse nue. Il suffit d'un regard, d’une rencontre pour que jaillissent les étincelles. Cette fille carbure à la haine et allume les hommes avec un plaisir sadique. Un personnage original, troublant, vulnérable et explosif comme de la nitroglycérine.
«Devant des yeux affamés, je sens mon corps dans toute sa plénitude. Je brille comme une pleine lune. Mes pieds sont des racines enfoncées dans la terre. Mes yeux sont des phares éclairant l’océan. Mon sexe est une centrale nucléaire.» (p.51)

Des papillons

Tous vivent comme des papillons qui se jettent dans les flammes pour se brûler les ailes et l’âme; tous cherchent l'amour et la passion, à casser cette solitude qui étouffe tout le
Françoise Tremblay construit son roman tel un puzzle. Nous passons d'un personnage à l'autre, scrutons les différentes facettes de cet étrange quatuor. Chacun présente un solo qui pousse la mélodie un peu plus loin. Une trame narrative qui se construit comme une suite de récitatifs ou de monologues qui nous font culbuter dans le drame.
«Je suis un rat. Marie avait raison. Un rat. Je suis de la race qui survit aux cataclysmes et qui s’adapte à toutes les situations sans jamais renoncer à rien. Ni bon, ni méchant. Petit, simplement. Sans envergure. Un rat. Je ne vaux rien et pourtant je continue à vivre.» (p.224)
Françoise Tremblay aime les situations tordues, les points de rupture. La tension monte et pointe l'irréparable. Les personnages se retrouvent dans une sorte de huis clos où ils doivent mordre pour survivre. Un peu comme dans «Souvernirs de Carthage». Un roman qui dévoile les aspects les plus inquiétants des hommes et des femmes.
Un bonheur de lecture malgré la dureté du propos. Françoise Tremblay maîtrise particulièrement bien son écriture. Toujours précis, vivant et bien mené. Des personnages qui sortent des sentiers battus et hantent le lecteur longtemps après avoir tourné la dernière page. Une belle réussite! Sans bavure!

«Les Nocturnes» de Françoise Tremblay est paru aux Éditions Trois-Pistoles. 

dimanche 24 avril 2005

Françoise Tremblay écrit dans l'inquiétude

Françoise Tremblay est arrivée avec trente minutes d'avance. L’imprévu l'inquiète. Elle a surtout du mal à affronter la pression. Pourtant, quoi de plus naturel que de parler de son dernier roman, de son métier d'écrire qu'elle pratique depuis 1995.
Elle vient de publier «Les Nocturnes» aux Éditions Trois-Pistoles. Un roman de passion et d'excès. «C'est étrange, mais «L'Office des Ténèbres» m'a assommée. Je me suis mis une tonne de pression sur les épaules après la parution. J'imaginais que le monde attendait beaucoup de moi. Je suis comme cela. Je ne suis jamais sûre. C'est mon parcours peut-être. Je suis née dans une famille où l'écriture n'avait aucune importance. Et là, ils sont obligés d'acheter mes livres...», explique-t-elle.

Le mot «stress» revient dans ses propos. Elle cherche à éloigner tout ce qui peut l'inciter à écrire et à arriver à un résultat rapidement.
«Je travaille en théâtre, en gériatrie aussi. Ce n'est pas facile, mais ça va bien de ce côté. Il faut convaincre, travailler et arriver à céder aussi parce que nous ne pouvons faire mieux. C'est bon pour moi et j'adore le théâtre. Une vraie passion», dit-elle.

Sujet

Et puis son dernier roman est là avec des personnages familiers et étranges. «Je cherchais une idée. J'ai fouillé dans ma bibliothèque et je suis tombée sur cette histoire d'amour et de passion folle. C'est la trame de mon livre. Bien sûr j'ai brossé, j'ai travaillé, j'ai puisé dans mon environnement. Je pense que Margot me ressemble beaucoup», explique-t-elle.
Il y a aussi la lecture de «Cendres de cailloux» de Daniel Danis qui l'a bouleversée. Ce texte a donné la forme du roman.
«Ce fut plus facile cette fois. Peut-être parce que je n'avais pas à fouiller pour l'histoire. J'ai travaillé un an à peu près», raconte celle qui a du mal à écrire, qui se pose beaucoup de questions en route.

Superstitieuse

Françoise Tremblay hésite à parler d'une pièce de théâtre qu'elle a expédiée au Cendre d'essai des auteurs dramatiques. Elle penche vers la comédie, mais ne veut pas en dire plus. «Je suis superstitieuse et je n'aime pas parler de quelque chose qui n'est pas là vraiment. Ça n'existe pas et je ne veux pas me mettre de pression», ajoute-t-elle.
Françoise Tremblay raconte son départ de la région à 36 ans, de son retour aux études, en littérature, de sa vie à Montréal et du rêve qu'elle avait d'écrire mais qui semblait impossible quand elle était petite fille. «Je vis bien à Montréal. Je suis sauvage. Le théâtre et mon travail me permettent de rencontrer des gens». Françoise Tremblay sait qu'elle pourrait facilement se replier sur elle et ne plus bouger. «J'étais comme ça quand j'étais petite. On ne voyait personne dans notre rang de Saint-Edmond.»
Oui, elle va continuer à écrire même si l'hésitation, l'angoisse, les tourments seront toujours là. Et le théâtre... Elle sourit, hausse les épaules comme si c'était un rêve impossible. Pourtant tout est possible en création. Françoise Tremblay l'a démontré à plusieurs reprises.

«Les Nocturnes» de Françoise Tremblay est paru aux Éditions Trois-Pistoles.