Aucun message portant le libellé Vaillancourt Marc. Afficher tous les messages
Aucun message portant le libellé Vaillancourt Marc. Afficher tous les messages

jeudi 12 octobre 2006

Vaillancourt continue son étrange aventure


Marc Vaillancourt est peut-être l’écrivain le plus étrange et le plus déroutant du Québec. Ce Chicoutimien a étudié le latin comme beaucoup de Québécois et il ne s’en est jamais remis. Cette langue est la clef du savoir et de la connaissance pour lui. Hors du latin, tout n’est qu’ignorance et bêtise.
Il publie régulièrement depuis 1992. Poèmes, essais, récits, roman marqués par ce savoir et cette langue qui sont de véritables hantises.
Je dois être l’un des rares au Québec à posséder l’ensemble de ses ouvrages et à suivre son parcours qui échappe à toutes les normes. Je ne sais pourquoi je m’entête à voir où il en est, quelle direction il va prendre. Force est de constater qu’il piétine et se répète de livre en livre.
Ses essais sont des monstres de mauvaise foi, de certitudes, de mépris, de misogynie et de sexisme. J’ai lu «Les ailes de la sibylle» et ses aphorismes où il charge aveuglément tout ceux qui publient et écrivent au Québec. Les femmes surtout ont droit à sa hargne. Les écrivains au Québec, selon notre latiniste retardé, sont des ignares, des béotiens et des imposteurs. On croirait surprendre Mordecaï Richler quand il perdait les pédales dans les journaux américains.
Le propos est tellement grossier qu’il est impossible de le prendre au sérieux malgré ses sparages, sa rhétorique, les citations d’auteurs oubliés et son écriture nourrie à la cortisone.
Je me suis lassé rapidement de son roman «Un travelo nommé Daisy» malgré un bon départ. Un clin d’œil au dramaturge Tennessee Williams, vous vous en doutez. Une véritable hérésie si on se fie à la logique de notre latiniste fondamentaliste. Un bon début, quelques dizaines de pages et le fiel se répand sur toutes les pages.
Il revient avec le «La cour des contes», un titre qu’il a chipé à la poétesse Louise de Vilmorin. Il l’avoue.
Je croyais que Marc Vaillancourt avait compris, du moins dans les premiers récits. De bons textes. Voici que je suis du côté des crétins qui le louangent ou qui lui administrent des baffes. Les journalistes et les critiques sont des paltoquets et des rustres dans l’esprit de notre intégriste. «Note me tangere», In extremis ou le dernier Noël de Yann Moreault» tout comme «La Chine m’inquiète» sont agréables malgré cette volonté de toujours tout compliquer. Un humour se dégage, un monde, un univers qui peut séduire.
Rapidement pourtant, il retrouve ses obsessions et ses jugements à l’emporte-pièce. Il traîne tout le monde dans la fange et la boue.
Pourquoi alors lire Marc Vaillancourt? Il est rare de rencontrer un homme d’une autre époque, quelqu’un qui s’est réfugié dans ce Québec qui se complaisait dans les versions latines et les déclinaisons.
Pourtant quand il oublie ses obsessions et sa volonté de faire comme si, il peut être attachant et étonnant. Il y a ici et là, des phrases qui sont des embellies dans une sacristie couverte de poussière. C’est peut-être pour cela que je continue à le suivre tout en gardant mes distances de peur d’être contaminé par ses obsessions. Dommage! Marc Vaillancourt gaspille un talent immense dans une recherche frénétique d’attention. La littérature peut aussi mener à une sorte d’obsession qui fait que l’on coupe tous les ponts avec ses contemporains et même avec sa propre culture. Voilà peut-être la plus terrible des aliénations. 

«La cour des contes» de Marc Vaillancourt est paru aux Éditions Triptyque.

samedi 28 février 2004

Marc Vaillancourt ou le suicide d’un écrivain

Marc Vaillancourt demeure un cas particulier. Après avoir publié de la poésie remarquée, des nouvelles fort intéressantes, voilà que notre Chicoutimien de naissance lance deux essais foudroyants. Des bijoux de hargne et de mauvaise foi contre la littérature et les écrivains du Québec. Il manie la phrase comme un lance-roquette et tire sur tout ce qui respire dans le monde littéraire.
Dans «Au poil et à la plume», il s’acharne à détruire ce qu’il avait pu négliger dans «Les feuilles de la Sibylle». On croirait se retrouver devant une réincarnation d’un ange vengeur fonçant sur l’Amérique pour exterminer tous les impies qui gravitent autour de l’écrit. Un véritable carnage.
«Des cuistres, des ploucs, des fumistes. Des benêts, des bélîtres. Des butors, des viédases, des microcéphales et des petits magouilleurs : bref des professeurs québécois. (p.65)
Et pour étayer son propos, il dépoussière les poètes grecs qu’il fréquente et ceux de la Rome d’avant Jésus-Christ. Des arguties sur des traductions, des précisions, des sentences, des citations à la douzaine d’écrivains français, bien sûr, et parfois des traits qui font hausser les épaules. Une prétention à nulle autre pareille.
«Quand je veux lire un bon livre, je l’écris,» (p.115)
Voilà de quel bois se chauffe notre prétentieux.

Tristesse

Il est rare de voir un écrivain se faire hara-kiri en pratiquant son art.
«Il paraît que je suis détesté dans le milieu littéraire. Mon cœur pépie de joie!» (p.173)
Après une cinquantaine de pages, j’ai commencé à me bidonner de ces dérapages et de ces extravagances. À trop en mettre, on finit par sombrer dans l’absurde. Il faut l’inviter à lire ses sentences au «Festival juste pour rire». Un écrivain est mort mais un humoriste est né.
«Un jour le chroniqueur culturel d’une feuille publique m’a dit avoir lu, compris et aimé un de mes poèmes. J’ai cru mourir de honte.» (p.161)
Des charges, des baffes qui frappent parfois dans le mille mais qui ne peuvent faire oublier la grossièreté des propos.
«Prend son cul pour mes choses, et son ombilic pour l’omphale. (Aggravation : poétesse québécoise : Le Torrent, de la gaupe Anne Hébert, la fait mouiller. Pour renfort de potage, la poétesse québécoise, lauréate du prestigieux Prix Tarattata Tsinsin, est le plus souvent professeure et a fait une poéthèse sur la poéterie, car «elle s’invente un langage et transgresse les interdits. (p.102)
Vous en voulez encore?
«Au Québec, pays d’ateliers d’écriture et de lécheurs conditionnés, on ne peut pas être sans avoir tété : voilà ce que vous devez comprendre chaque fois que vous entendez un des mâche-laurier de la tribu, parler de son inspiration.» (p.64)
«Celui qui ne possède pas sa syntaxe latine, son vocabulaire latin, sa grammaire du grec, et qui prétend écrire en français, sera tout au mieux un auteur estimable. Il ne sera jamais un écrivain accompli. »(p.106)
Et vlan! Autant réinventer le cours classique et les enfants de Duplessis.

Réactionnaire

Une certaine forme de société s’esquisse derrière ces galéjades et ces coups d’estoc. Il regrette les cérémonies religieuses latinisantes, serait plutôt papiste, réactionnaire et misogyne. J’ai rarement lu autant de mépris sur les femmes et les écrivaines.
«Au reste, existe-t-il des critiques dignes de ce nom au Québec? N’y aurait-il que des profiteurs et des fumistes, qui ne font jamais rien qu’en vue des intérêts de leurs complices, à charge de revanche, et sans souci de rien d’autre» (p.116) 
Alors pourquoi me priver? J’ai cru par moment me retrouver au XVe siècle.
Et pour terminer, je retiens cette sentence qu’il a puisée chez Voltaire : «Il se donna bien de la peine/Pour vivre pauvre et méprisé». Que Dieu ait son âme en latin de préférence.

«Au poil et à la plume» de Marc Vaillancourt est paru aux Éditions du 42e Parallèle.